Début janvier, le Gouvernement a été refondu. S’il a perdu sa Ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, et son Ministre du Logement, Patrice Vergriete, il a renforcé son Ministère de l’Économie, chargé désormais de l’énergie (dont le volet CEE). Face à lui, le Ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a récupéré le portefeuille de la rénovation énergétique. Aux côtés des confirmations et éliminations de postes, des conseillers ministériels ont récemment été reconduits dans le pôle « écologie, agriculture, énergie, logement et transport » à Matignon, dont Christophe Leininger, Aurélie Vieillefosse et Sandie Michelis, respectivement conseillers énergie, écologie et logement.
Enfin, une liste complémentaire devrait bientôt être égrainée par le Secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, afin de compléter le Gouvernement.
Or, l’absence d’un Ministère du logement est bien ce qui inquiète, en autres, le secteur qui manifeste ses craintes. Car la France connaît sa pire crise du logement depuis des dizaines d’années, pronostiquée dès 2022 par l’ancien Ministre du Logement, Olivier Klein, comme « la bombe sociale de demain ».
En effet, les constructions neuves ont chuté au point que le niveau est égal à celui des années 90, qu’il s’agisse de l’habitat individuel comme du collectif. Sur l’année 2023, 373 100 logements ont été autorisés à la construction, soit 115 900 de moins que lors de l’année précédente (- 23,7 %) et 19,0 % de moins qu’au cours des douze mois précédant la crise sanitaire (mars 2019 à février 2020). D’après la Fondation Abbé Pierre, 166 milliards d’euros de crédits immobiliers étaient attribués sur 12 mois en octobre 2023 contre 271 milliards en 2022. La Commission des affaires économiques du Sénat estime quant à elle que ce sont près de 300 000 emplois en jeu dans les deux ans à venir dont la moitié directement dans le bâtiment et l’autre moitié dans tous les métiers qui en dépendent.
La construction de logements sociaux a elle aussi chuté : 125 000 logements financés en 2016 contre 93 000 seulement en 2023. La Caisse des dépôts a par ailleurs estimé que la construction de HLM pourrait chuter à 60 000 logements par an à partir de 2030.
Par ailleurs, cette crise structurelle devrait également priver l’État de près de 4 milliards d’euros de recettes de TVA en 2024 d’après François Jolivet député (Horizons) de l’Indre et rapporteur du budget Logement.
Les besoins en logements sont pourtant évalués entre 400 000 et 500 000 logements par an.
L’augmentation du coût des matières premières n’en est pas la seule cause, à laquelle il faut ajouter l’augmentation du taux d’intérêt, la suppression du prêt à taux zéro, la limitation à 35 % du budget des ménages pour emprunter, la durée des prêts fixée à 25 ans ainsi que l’inflation.
Les réhabilitations et rénovations (R&R) apparaissent alors comme une solution tant pour le secteur du bâtiment que pour les Français. Outre leurs intérêts en matière d’économie, d’emploi et de logement, ils ont pour vertu de lutter contre l’étalement urbain et la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Ils permettraient aussi d’absorber une partie des emplois détruite à cause de la crise de la construction neuve, si celle-ci est formée. À ce titre, le nombre de chantiers chez les particuliers est à la hausse de 4 % d’après la FFB. Par ailleurs, les R&R représentent un changement de paradigme pour les Français qui passent d’une logique de construction de logements individuels à celle de la R&R responsables du bâti déjà existant et ancien et les obligent à repenser leur mode d’habitation.
Ces craintes sont exprimées par le secteur. Comme d’autres acteurs, le Symbiote estime qu’un ministre de plein exercice pour le logement devrait être nommé (le dernier ministre de plein exercice étant Emmanuelle Cosse [2016-2017]). Le Conseil national de la refondation pour le logement, les rapports rendus par le Conseil national de l’habitat, les nombreuses contributions des acteurs du secteur attestent que le logement est un sujet crucial devant être pris en charge par un ministère disposant de la marge de manœuvre suffisante pour une action efficace. Il s’agit d’un enjeu politique, économique et social de premier ordre.
Lors de son discours de politique général, tenu le 30 janvier dernier, le nouveau Premier ministre Gabriel Attal a abordé le sujet. Après avoir eu un mot sur les « métiers de la rénovation thermique », plusieurs annonces ont été faites, comme la simplification de Ma Prime Rénov’ (MPR) et du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE).
Toutefois, l’annonce d’une nouvelle salve de nominations se fait encore attendre. Dans la presse est évoquée la potentielle nomination de Patrice Vergriete comme Ministre du Logement, avec un portefeuille augmenté de celui du transport. Le logement pourrait également revenir à Christophe Béchu, puisque Patrice Vergriete était son Ministre délégué. Les noms de Guillaume Kasbarian, député Renaissance, tout comme celui de Christelle Morançais, Présidente du Conseil régional des Pays de la Loire, auraient également été évoqués.
Récemment, le Gouvernement avait été épinglé pour son désengagement progressif face à ce sujet.